Hypnose : la difficile évaluation. Dr Marc Galy


Article paru dans la revue Egora n°69 suite au Congrès Mondial d'Hypnose de Paris 2015.

La nature même de l’hypnose rend difficile l’appréciation de son efficacité dans le traitement de plusieurs pathologies.


Elle s’installe peu à peu dans les hôpitaux français.

Que ce soit en anesthésie, chirurgie, cancérologie, pédiatrie ou aux urgences, l’hypnose est une technique médicale de plus en plus utilisée, comme l’a montré à Paris le XXe Congrès mondial Hypnose « Racines et futur de la conscience » présidé par un Français, le Dr Claude Virot, psychiatre, avec 2 500 participants venant de plus de cinquante pays, 300 interventions sous forme de conférences ou d’ateliers. Un tel rassemblement est le reflet de l’intérêt grandissant pour cette pratique et de la demande croissante des patients.

Les outils hypnotiques sont utilisés pour réduire l’agression médicamenteuse, changer les perceptions douloureuses (aiguës ou chroniques), offrir des instruments aux patients (avec l’autohypnose), ouvrir d’autres espaces de conscience et faire renaître le lien thérapeutique.

L’IRM fonctionnelle met en évidence des modifications

Chacun s’accorde à dire qu’il existe encore de nombreuses difficultés pour prouver scientifiquement l’efficacité de l’hypnose dans les différentes situations cliniques dans lesquelles elle est utilisée. Ces difficultés résultent d’une part de la nature même de l’hypnose mais aussi d’une interrogation sur la nature du « code de la conscience », même si Stanislas Dehaene ouvre des portes dans son remarquable ouvrage. L’une des interventions du Pr Marie-Élisabeth Faymonville, de Liège (Belgique), fut sur ce thème : « Hypnose et recherche ».

Même si la visualisation par l’imagerie par résonance magnétique (IRM) fonctionnelle apporte quelques éléments, elle ne suffit pas à expliquer la nature même de l’hypnose. ll rejoint ainsi le Dr Jean-Marc Benhaiem, de l’hôpital de La Pitié-Salpêtrière à Paris, qui conclut sa conférence sur les « Rapports de l’hypnose à la science » en soulignant que l’hypnose a besoin de la science pour comprendre son mécanisme d’action, mais que la science doit aussi s’ouvrir à l’hypnose dans sa composante créative et lâcher, peut-être, quelques-unes de ses certitudes.

De nombreuses conférences ont abordé les thèmes de la créativité dans la relation de soin entre patient et praticien, qui s’intègre dans l’indispensable alliance thérapeutique. En effet, la pratique de l’hypnose n’existe que dans ce rapport étroit entre lien thérapeutique et créativité. C’est probablement l’une des difficultés de la science dans sa recherche de la preuve. Cette disponibilité du praticien envers son patient qui fait partie intégrante des outils hypnotiques n’appartient pas au domaine de la preuve scientifique. Elle appartient à la clinique et au lien thérapeutique. Au-delà du congrès, le rapport de l’Inserm publié en juillet le montre bien.

Cette relation thérapeutique humaine qui fait entièrement partie des outils hypnotiques ne participe pas à l’évaluation clinique de l’efficacité de l’hypnose. C’est pour cela que malgré quelques résultats encourageants dans le domaine de l’anesthésie et dans le syndrome du côlon irritable, la preuve de l’efficacité de l’hypnose est difficile à affirmer dans les études retenues.

Le thème de l’intégration de la pratique de l’hypnose dans les structures hospitalières fut également abordé dans différentes conférences. Intégrer l’hypnose en milieu psychiatrique ou dans des structures hospitalières dites généralistes est une nécessité qui permettra de mieux comprendre sa pratique et son utilité. C’est à l’intérieur des projets hospitaliers de réduction des durées d’hospitalisation et de diminution des agressions thérapeutiques et médicamenteuses que l’hypnose trouvera sa place. C’est là quelle participera à la réduction des coûts, non pas comme élément isolé mais intégrée dans une démarche stratégique thérapeutique et économique.

La formation doit entrer dans les universités

L’avenir passe comme toujours par la formation. Formation des étudiants en médecine et des futurs spécialistes au sein des DES Formation du personnel soignant dans les écoles et dans les services hospitaliers mais aussi en médecine de ville. Cette formation doit entrer largement dans les universités.

Actuellement, ce sont des instituts privés qui assurent l’essentiel de cette formation. Et associer les instituts privés et l’université semble indispensable pour assurer une formation sérieuse et efficace.

Dr Marc Galy

Groupe hospitalier Paris-Saint-Joseph, Paris et enseignant à l’Institut Emergences (Rennes) et à La Pitié-Salpêtrière (Paris).


Deux moments forts du congrès

La conférence de Bertrand Piccard tout d’abord. Ce psychiatre aventurier des airs, l’homme de Solar impulse, est venu demander à chacun de « changer d’altitude ». L’hypnose, il connaît et il pratique aussi l’autohypnose. Il nous demande de « lâcher les certitudes pour avancer ». Il rejoint peut-être là Jean-Marc Benhaiem...


Que dire de la présence de François Roustang, l’auteur de tant d’ouvrages sur la pratique de l’hypnose, pour modérer les conférences du jeudi soir à côté de son ami le Canadien Gaston Brosseau ? L’amphithéâtre s’est levé pour l’applaudir de nombreuses minutes afin de saluer son immense travail.


Rédigé le Jeudi 15 Octobre 2015 à 15:37 | Lu 1585 fois modifié le Jeudi 15 Octobre 2015